Anne – Josephe Théroigne de Méricourt « C’est par le port des armes que nous gagnerons l’égalité entre les femmes et les hommes »

La vie de Théroigne de Méricourt est pleine de rebondissement,
engagée dans la Révolution Française jusqu’à la folie. Dans la guerre
révolutionnaire qui née de la Révolution Française, elle plaide une
nécessité aux femmes à prendre les armes. Pourtant, c’est aussi les
femmes qu’elle met pour générer un apaisement auprès des citoyens et
tenter d’éviter la guerre civile.

 

 

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Sarah Bernardt en Théroigne de Méricourt

TW agression sexuelle : cette mention prévient le lecteur ou la lectrice de l’article de l’évocation d’une situation de violence qui pourrait être malaisante.

 

Vous avez toutes et tous déjà vu ce tableau, pensant certainement qu’il représentait la révolution française. Ce n’est pas le cas, Delacroix représente ici une autre révolution, bien plus proche de lui: les trois glorieuses. Pourtant, cette figure féminine, que l’on relie souvent à une Marianne dénudée est bien un personnage de la Révolution Française : Théroigne de Méricourt, dont la vie inspira également Charles Baudelaire ou Sarah Bernardt.

 

Orpheline, Vachère, Servante, Voyageuse.

 

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Théroigne de Méricourt supposée à 20 ans

Le nom d’Anne-Josephe Théroigne de Méricourt ne traduit pas une naissance de noblesse, il s’agit bien là d’un pseudonyme choisit non sans référence à une volonté d’élévation de son statut social. Fille de laboureur, elle née dans la principauté de Liège (actuellement au Luxembourg) en 1762. Lorsqu’elle perd sa mère à 5 ans, elle est refilée
à différentes tantes jusqu’à se retrouver au couvent. Lorsqu’à 12 ans, elle rentre chez son père, qui s’est remarié, elle s’enfuit rapidement
faute de pouvoir s’entendre avec sa famille. D’abord Vachère à 14 ans,
c’est servante qu’elle est lorsque tout change lors de ses 17 ans.

Madame Colbert est une femme du monde anglaise. D’abord, elle lui témoigne de l’affection, puis elle lui apprend à lire, écrire, chanter, jouer de la musique et Anne – Josephe est pendant 4 ans sa dame de compagnie. Dans une vie de voyage et d’amour qui la mène à Londres où elle est éperdue d’un officier, en Italie où c’est un castra qui l’émeut, elle apprend en 1789 la convocation des États Généraux par Louis XVI.

 

Ne pas manquer les événements français !

 

Anne – Josephe Théroigne de Méricourt arrive en France le 11 mai 1789 et ne veut rien manquer des événements de la Révolution Française. Si bien qu’elle s’installe même à Versailles. Elle choisie alors ce pseudonyme, une version francisé de son nom wallon Terwagne. Son habit est modifié par la mode lancée par la comtesse Du Barry : elle choisit l’amazone.

Elle a 3 tenues, une blanche, une rouge et une noire, mais ses ennemies la décrive toujours de rouge, telle une « Bacchante sanguinaire ». Au 14 juillet 1789, elle prend place dans la foule qui prend la bastille. Les 5 et 6 octobre 1789, elle ne fait pas partie des foules de femmes qui partent à Versailles chercher la famille royale et assassine deux
gardes sur son passage (1), mais elle rejoint bien Paris lorsque la famille royale revient aux Tuileries ainsi que l’Assemblée (Le 19 octobre). Anne – Josèphe Théroigne de Méricourt tient alors un salon où révolutionnaires et intellectuels se retrouvent pour échanger sur cette révolution en marche, cette forme, le salon est certainement l’ancêtre des apéros-débats que nous continuons de faire exister ! Se croise alors entre ces murs Camille Desmoulins ou Saint-Just pour les plus connus. Parallèlement à cette organisation informelle, elle fonde avec le mathématicien Charles – Gilbert Romme la « Société des amis de la loi » dont l’objectif est de tenir informer le peuple des discussions de l’assemblée. Mais c’est aussi une femme de verbe qui s’exprime volontiers à la tribune.

Une instruction est ouverte pour les faits des 5 et 6 octobre 1789, citant Reine Audu et Théroigne. Elle s’enfuit alors à Liège et lorsqu’elle repasse à Paris pour régler un impayé, elle est enlevé par les autrichiens et enfermée dans le Tyrol. Grâce à des tractations du gouvernement français, elle est libérée en conditionnelle en 1791 où elle regagne Paris.

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Théroigne de Méricourt en Amazone Rouge

« Elevons-nous à la hauteur de nos destinées, brisons nos fers. Il est temps enfin que les femmes sortent de leur honteuse nullité où l’ignorance l’orgueil et l’injustice des hommes les tiennent asservies depuis si longtemps ! « 

Le 26 janvier 1792, elle rejoint les jacobins en faisant une entrée triomphante, elle est alors républicaine et s’affirme contre les bourgeois qui préféreraient voir les femmes regagner le foyer.

Favorable à la guerre, en 1792, elle propose de créer une phalange d’amazone. Pauline Léon présente une pétition à la législative, signée de 320 parisiennes pour avoir le droit de former une garde nationale féminine.

Devant la société fraternelle des minimes, Anne – Josephe fait cette célèbre annonce, invitant les femmes à s’organiser en corps armé : « Françaises, je vous le répète encore, élevons-nous à la hauteur de nos destinées, brisons nos fers. Il est temps enfin que les femmes sortent de leur honteuse nullité où l’ignorance l’orgueil et l’injustice des hommes les tiennent asservies depuis si longtemps ! « 

 

Folle.

 

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Portrait à l’asile.

Le 10 aout 1792, comme nombre de citoyen, Théroigne participe à l’invasion des Tuileries.
Alors qu’elle prône un apaisement pour éviter la guerre civile, dans le cadre de laquelle elle organise en 1793 dans chaque section de magistrature, 6 citoyennes qui auront pour objectif la résolution des
conflits, elle est accusée par son camps à l’assemblée nationale d’avoir soutenu Brissot, chef des girondins.
Les femmes girondines l’insultent, la dénudent et la fessent publiquement. Ce 13 mai 1793 provoque le passage à la folie de Théroigne de Méricourt. C’est Marat qui met fin à l’agression.
Après cela, sa peur de l’agression sombre dans la folie, n’oublions pas qu’autour d’elle nombre d’entre les citoyennes sont guillotinées, et qu’elle est aussi à un stade certainement avancé d’une maladie
vénérienne.

Au printemps 1794, son frère demande son internement et la met sous tutelle.
Cet internement pourrait avoir été au profit d’un éventuel conflit d’intérêt de son frère en rapport avec ses biens, toujours est-il qu’il lui évite l’échafaud comme Olympe de Gouge et Madame Roland.

Après 23 années d’asile, elle meurt en 1817.

De nombreuses recherches témoignent de cette vie aventureuse. Mais une question demeure encore, alors qu’en 1989, pour le bicentenaire de la Révolution Elisabeth Roudinesco en faisait une folle déguisée en révolutionnaire, n’était-elle pas plutôt une révolutionnaire rendue folle?

Femmes dans une révolution

 

CurieusesHistoiresTheroigne1Elle nous permet de remettre au centre de l’histoire la place des femmes dans la Révolution Française où l’on met souvent Olympe de Gouge comme une figure d’exception, il n’en est rien, d’autres figures sont passées à l’oubli mais ont aussi donné des apports fondamentaux aux luttes des femmes pendant cette révolution. D’ailleurs cette question de la réappropriation des armes par les femmes dans un contexte révolutionnaire reviendra souvent dans des situations du XXème et du XXIème siècle : on pense bien sûr aux femmes volontaires dans les Brigades Internationales en 1936 en Espagne où les femmes kurdes en
lutte contre l’État Islamique depuis 2013.

 

 

 

Anna Jaclard

 

1. Il existe plusieurs versions de cette histoire, certains disent
qu’elle était présente sans participer aux violences.

Pour aller + loin :

https://histoireparlesfemmes.com/2013/11/08/theroigne-de-mericourt-personnalite-de-la-revolution/

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